Dysmorphophobie Snapchat : quand la distance entre le réel et le virtuel disparaît | Femme actuelle

Les patients entre 18 et 25 ans sont de plus en plus nombreux à pousser les portes des cabinets des chirurgiens esthétiques, afin de ressembler à leurs selfies retouchés. Pour en savoir plus sur ce phénomène inquiétant, qui touche en majorité les jeunes femmes, le magazine « Femme Actuelle » a interviewé Tracy Cohen – Sayag, directrice de la célèbre clinique des Champs-Elysées.

Un manque de distance entre le réel et le virtuel

Bien avant l’arrivée de Snapchat et Instagram, les outils de retouches existaient déjà. Ils étaient notamment utilisés dans le secteur de la publicité, pour les retouches de stars ou de mannequins. Aujourd’hui, ces outils se sont considérablement démocratisés et sont accessibles à tous, notamment grâce aux smartphones. En quelques secondes, il est possible de retoucher son visage instantanément. Certains filtres ont le pouvoir de lisser extrêmement la peau, d’affiner le nez, de modifier la forme des yeux, de rendre des lèvres plus charnues et d’apporter une totale symétrie à un visage : un idéal de beauté qui n’est pas toujours sans conséquence.

« Notre cerveau finit par s'habituer à ce reflet embelli de notre image et au fil du temps, cela peut créer des troubles psychologiques en lien avec l'identité et l'estime de soi », affirme Célia Crema, sociologue.

Quand l’avatar prend le dessus sur la personne réelle

En quelques secondes, un filtre a le pouvoir de nous embellir. À tort car certaines personnes pensent que c’est la même chose avec la chirurgie esthétique et sont prêtes à passer sous le bistouri pour se créer un visage sur mesure.

Mais la chirurgie n’est pas une baguette magique : certaines opérations ne sont pas techniquement réalisables, comme le fait par exemple de vouloir modifier la forme de ses yeux, il y a tout un processus de cicatrisation après opération. Ensuite, le résultat final ne sera pas exactement le même d’une personne à l’autre.

Tracy Cohen a également constaté l’émergence de ce phénomène dans sa clinique : « Aujourd’hui, les patients de moins de 35 ans représentent 50% de notre clientèle. La plupart d’entre eux se rendent dans ma clinique avec une demande précise, réalisable et parfaitement fondée. Toutefois, il est vrai qu’une minorité de patients arrivent avec des demandes un peu plus extravagantes. C’est la raison pour laquelle je fais toujours en sorte de ne pas banaliser la chirurgie esthétique sur nos réseaux sociaux, même si c’est mon cœur de métier. Je demande aux personnalités médiatiques qui sont passées par notre clinique de ne pas trop partager leurs expériences, car ils ont une communauté très jeune, qui manque parfois de recul ».

La dysmorphophobie snapchat : pointe de l’iceberg ?

La dysmorphophobie cache bien souvent des maux bien plus profonds, comme nous l’explique Gabrielle Arena, psychiatre en région parisienne : « Les jeunes traversent quasiment tous une période de quête identitaire, ce qui explique qu’ils soient plus touchés par ce type de troubles, qui atteint principalement des profils solitaires, timides ou vulnérables en raison de problèmes familiaux, par exemple. Ce type de comportement peut être aussi bien passager que durable. Quand il dure, il cache parfois des problèmes bien plus graves, comme une anorexie mentale ou un début de psychose ».

Fin 2019, Instagram a d’ailleurs décidé de supprimer les filtres à effet chirurgie esthétique.

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